Le pouvoir d’achat tout comme celui d’acheter est le centre d’une toile d’araignée qui comprend le droit au travail, la formation initiale et continue, la retraite, la prévention aussi bien sécuritaire que celle de la santé, l’entreprise, la balance commerciale avec les importations et l’exportation et bien sur la conception que l’on a de notre manière de vivre.

Le « droit au travail »

Que nous fassions partie de la France « d’en haut » ou de « la France d’en bas » nous devons travailler pour répondre à nos besoins matériels. Seuls, quelques rares capitalistes qui font travailler leur argent échappent à cette obligation. Pour cette raison, travailler est un droit.

Mais il ne faut pas confondre le « droit AU travail »  qui nous ouvre la porte de l’emploi, avec le « droit DU travail » qui est celui du code. Le « droit au travail » doit être inscrit dans la Constitution. Il est à la fois un droit et une obligation.

  • Un droit consenti : Parce que nous revendiquons qui nous sommes et ce que nous sommes, par conséquence notre savoir et savoir-faire, même si les événements et les aléas de l’existence ne nous amènent pas toujours là où nous souhaitons aller.

  • Une obligation subie : Parce que chaque individu est une infime partie intégrant un système économique et sociétal qui rémunère le travail fourni et lui permet de consommer, donc de nourrir cette économie dont il est solidaire.

Le travail qu’on fait par force est toujours mal fait, dit un proverbe basque 1 et c’est souvent vrai. Défini comme une obligation à la fois morale et matérielle, avons-nous vraiment la liberté du choix ? La plupart d’entre nous doit se satisfaire d’un travail qui leur permet de survivre et dont il ne tire aucun plaisir. Quelques rares privilégiés s’épanouissent dans le leur, mais ceux qui subissent, ont-ils le choix de faire ce qu’ils ont envie, de vivre comme ils veulent ? Notre éducation, notre instruction, notre environnement influencent ce choix. Surtout, si en plus, nous avons eu une orientation subie et non choisie pendant nos études. Pendant des années, on nous a martelé des phrases comme « l’épanouissement de la femme dans le travail », ou « ce n’est pas un travail pour toi ». Mais s’épanouit on vraiment dans un travail en usine, à la chaîne, où le même geste est répété des millions de fois. L’homme s’épanouit-il au rythme des « cadences infernales ». Sans parler des heures décalées, des travaux dangereux, etc…

Le confinement nous aura démontré deux choses, s’il fallait encore les expliquer.

L’économie a besoin du capital, mais surtout des hommes et des femmes qu’ils soient patrons ou salariés et de la consommation pour fonctionner. En prenant pour exemple les soignants que personne ne pouvait remplacer, il fallait d’autres bénévoles pour les emmener sur leur lieu de travail, pour garder leurs enfants, d’autres pour cueillir les légumes qu’ils allaient manger, d’autres encore pour fabriquer masques, blouses dont ils avaient besoin …. Le télétravail est devenu un outil nécessaire à l’économie, mais seulement un outil. Il ne remplace pas l’humain et ne résout pas à lui tout seul l’énorme machine du circuit économique qui a besoin de tous.

Une seconde constatation : le confinement engendre pour beaucoup de personnes le stress. Ne pas sortir, ne pas rencontrer du monde, discuter. Le travail étant un lien de socialisation, il est donc plus utile et meilleur pour la santé de travailler que d’être aidé par l’Etat. Au moment du dé-confinement, beaucoup ont eu du mal à sortir, traumatisés par le bruit, la foule, les voitures …

Si les consommateurs sont le moteur de l’économie, entreprises, patrons, salariés, en sont les « outils »

Avant de parler de « droit du travail », parlons d’abord de l’entreprise, des patrons et des salariés.

1) La taille de l’entreprise et les patrons

Les patrons, les collectivités locales, État compris, (puisqu’il est l’employeur de la fonction publique), sont les modernes seigneurs du Moyen-Âge, qu’ils soient grands ou petits. Être patron donne des droits, mais surtout des devoirs.

Tout comme il y a deux sortes principales d’entreprises, il y a deux sortes de patrons :

  • Ceux des PME, PMI et des entreprises individuelles qui ont engagé non seulement leur temps et leur responsabilité, mais aussi leur argent. Il n’est pas anormal que plus ils travaillent, plus ils peuvent gagner de l’argent. Sinon, ils se seraient contentés de rester salariés, sans contraintes et ils nous manqueraient cruellement.

  • Les grosses entreprises cotées en Bourse qui ont à leur tête un salarié nommé par l’État ou par un conseil d’administration. Si un salarié commet une faute, il est pénalisé suivant la faute par une mise à pied ou un licenciement. Il devrait en être de même pour eux. Ne dit-on pas « tous égaux ». Cela n’empêche pas qu’ils puissent, tout comme les salariés qui travaillent sous leurs ordres, avoir des primes en rapport avec leur poste lorsque l’entreprise est bénéficiaire.

2) L’outil de travail

La mondialisation a permis le transfert des capitaux. Sur notre territoire, de nombreuses entreprises françaises deviennent des filiales étrangères, à cause de l’acquisition d’actions par des entreprises ou des groupes financiers étrangers. Ce qui a permis au patron de Mittal, de fermer Arcelor et de refuser de la vendre, ne voulant pas se créer une concurrence. C’est son droit, l’aciérie lui appartient. Mais aux salariés, que reste-t-il ? Les yeux pour pleurer et personne pour reconstruire une autre unité de production.

Depuis une trentaine d’années inexorablement, petit à petit, nos entreprises sont soit rachetées, soit fermées. Un pays sans usines de production est un pays qui dépend entièrement des autres. Par l’intermédiaire de la Bourse et de la délocalisation, nous nous sommes donné le bâton pour nous faire battre. Il est trop tard pour inverser la vapeur. Les pays exportateurs pourront nous mettre à genoux en refusant simplement d’exporter leurs produits ou en rachetant et en fermant nos entreprises. La gauche pensait que le social et l’écologie pourraient sauver l’économie française. La droite misait sur les services et le tourisme. Ce n’étaient qu’emplâtres sur jambe de bois, si dépendant des décisions d’un pays producteur ou d’un événement extérieur nous ne pouvons plus nous fournir.

Le système économique se révèle donc obsolète et inefficace. Il ne faut pas croire qu’en fermant les frontières, en relocalisant nos industries on aura trouvé la solution. Une économie locale ne sera pas suffisante. Il faut donc penser à faire cohabiter deux systèmes ; un local et un de multinationales européennes.

  • Du local pour réduire les transports, travailler sur place. Start-up, PME/PMI, agriculture, services, tourisme local sont les secteurs de prédilection, en privilégiant ce qui peut être fabriqué et consommé sur place.

  • De grandes multinationales réparties en Europe pour faire face à la concurrence mondiale. Nous avons besoin de nous unir pour imaginer et construire des industries et des manufactures comme nous l’avons fait pour Airbus. Nous ne pouvons avoir des entreprises de cette taille dans des secteurs très particuliers que lorsqu’un marché est international. Il ne peut y avoir en Europe, dans chaque pays, un avionneur de la taille d’Airbus. Il faut être logique.

 

Nous sommes les meilleurs, nous sommes les plus forts. Nous pourrions l’être

Il paraît que notre économie est repartie, suite au confinement. Ce qui est normal, puisqu’on ne dépensait plus. On ne sortait plus. A part les commerces indispensables, tout était fermé. Il est donc normal, que comme après la guerre, l’économie reparte, mais pas vraiment 7% de croissance en 2021, après 8% de retrait du PIB en 2020 le compte n’y est pas.

La méthode Coué a du bon, mais ce n’est qu’une méthode afin de nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Alors que l’on nous disait que nous avions la meilleure prise en charge de santé du monde, nous venons de voir, preuves à l’appui que notre système de santé est loin d’être au top. Pourquoi n’avait-on pas écouté en leur heure les acteurs du terrain, médecins et soignants enchaînant grèves sur grèves pour dénoncer le manque de lits, de personnels, de matériels. Ce qui n’empêchait pas dans le même temps l’ARS (Agence Régionale de Santé) de vouloir continuer sa politique de suppression de personnels et de lits. Il est vrai qu’entre la Covid et les démissions, il manquait du personnel.

En théorie on peut tout faire, tout dire, mais ce ne serait pas raisonnable. Nous savons que les caisses sont vides, puisque nous vivons sur de l’emprunt. Il va donc falloir faire des choix. Nous voudrions être les meilleurs et les plus forts, ce n’est malheureusement pas le cas, mais nous avons l’expérience du terrain qui est souvent celui du système D qui, en ce moment, peut se révéler la meilleure et la plus efficace solution.

Un exemple : Dans l’urgence, un collectif de 250 personnes bénévoles “Makers for life”, issus de plusieurs domaines complémentaires ont créé des respirateurs adaptés pour la Covid 19. MakAir. Une machine à bas coût – pas plus de 1 000 € – pouvant remplacer des équipements valant plus de 45 000 € en milieu hospitalier en leur retirant 80 % de leurs fonctionnalités, qui s’avèrent inutiles pour soigner le coronavirus. Il aura fallu un mois de travail acharné pour que le projet MakAir naisse... Mais quand on veut, on peut et ils l’ont prouvé. Ils avaient même réussi à motiver du personnel de l’Agence de Sécurité du Médicament pour traiter le dossier sans le faire traîner. Ils n’attendaient plus que le feu vert suite aux essais. Feu vert qui fin décembre 2021 n’a pas eu l’air d’avoir été donné suite, l’administration étant passée par là. Et vous comprendrez pourquoi nos cerveaux partent à l’étranger.

Assemblé à partir d’éléments provenant du commerce auxquels ils ont rajouté un savoir-faire collectif, cet exemple fait partie du système D. L’expérience de terrain, la solidarité ont ici remplacé l’industrie sophistiquée qui coûte cher et qui n’est pas réactive lorsque le besoin s’en fait sentir. Pas le temps de déposer un brevet. Il est en open source sur le Net. A cause du confinement, les codes du travail et nous supposons de quelques autres n’auront pas été respectés, qu’importe, ils étaient tous volontaires et bénévoles et cela a permis à un autre esprit d’entreprise, de solidarité d’éclore. En temps normal, il aurait fallu deux à trois ans pour que cet appareil voit le jour. Pour les acteurs de terrain, alors qu’ils avaient les mains libres grâce au confinement, cela aura pris deux à trois mois avec les essais.

Si nous avons pris comme exemple les respirateurs, c’est pour donner un aperçu de ce que peut faire une coordination d’entrepreneurs français si on leur en laisse la possibilité.

Le problème se situe au niveau des syndicats et surtout de l’inspection du travail. Il faut les comprendre, ils sont là pour défendre les salariés. Ce qui a été fait n’aurait pas pu se faire s’ils en avaient eu vent. Dans un article paru sur France culture 2 il nous est donné cette définition : « leurs conditions de travail (aux inspecteurs et contrôleurs du travail) respectent non seulement tout ce qui relève du code du travail (par exemple, les contrats) ; mais aussi, tout ce qui touche à l’hygiène et à la sécurité sanitaire. Ainsi l’inspection du travail ne doit pas seulement vérifier la conformité au droit du travail, mais aussi à des textes moins connus comme le code de la santé publique, le code de la sécurité sociale, voire au code pénal ».

Contourner le Code des marchés ou tout au moins inclure dans les appels d’offre l’environnement, la proximité et la langue, contraire à la logique européenne de la concurrence, mais nécessaire à tous pour relancer l’économie.

Simplifier le code du Travail est une obligation, trois mille pages sont deux mille cinq cents de trop. Il est tout à fait possible de protéger encore mieux le salarié avec moins de pages.

A suivre ….

1Les anciens proverbes basques et gascons (1845)

2https://www.franceculture.fr/societe/a-t-sacrifie-ceux-qui-travaillent-aujourdhui