De dramatiques événements sont survenus depuis le mois de mai de cette année, dans ce coin de France dont on ne parle pas ou très peu et seulement lorsqu’il y a des émeutes. Émeutes qui ne sont qu’une suite inéluctable de décisions prises à tous les niveaux. Mais pourquoi cette révolte, pourquoi cet embrasement de violence ?
Il y a toujours plusieurs façons de raconter l’histoire et de voir l’enchaînement des événements. On peut voir seulement la réforme voulue en mai 2024 par Emmanuel Macron, ou bien remonter à la colonisation par Napoléon III en 1853, (1) mais on peut aussi s’arrêter sur un fait important que l’on passe sous silence : la décolonisation voulue par les Nations Unies.
Pourquoi ce besoin de « décolonisation » qui va laisser un pays en ruine, « décolonisation » voulu par l’ONU en 1946, qui s’il est plus que compréhensible au vue d’une colonisation qui a parqué les kanaks dans un pays qui était libre pour s’approprier ses richesses, ainsi que l’on fait les immigrants avec les amérindiens dans ce qui seront les futurs Etats-Unis.
Comment l’ONU avec ce qui semble au départ une bonne intention arrive à mettre un pays à feu et à sang ?
Pour comprendre il faut remonter à la fin de la guerre lors de la création des Nations Unis.
Les Nations Unies et la décolonisation (2)
En 1945, au moment où l’Organisation des Nations Unies est fondée, 750 millions de personnes — soit près du tiers de la population mondiale de l’époque — vivent dans des territoires qui ne sont pas autonomes et qui dépendent de puissances coloniales. Aujourd’hui, il reste encore 17 territoires non autonomes, où vivent moins de deux millions de personnes.
La Nouvelle-Calédonie est alors inscrite sur la liste de ces territoires (3) après que la France eut communiqué les renseignements visés à l’alinéa e de l’Article 73 de la Charte des Nations Unies sur ce territoire et ses dépendances. En 1986, l’Assemblée générale de l’ONU (4) a réinscrit la Nouvelle-Calédonie sur cette liste, considérant qu’elle était toujours un territoire non autonome au sens de la Charte. c’est-à-dire un territoire dont la population ne s’administre pas encore complètement elle-même. Depuis, il y a eu les accords de Matignon et de Nouméa, pour amener la Nouvelle-Calédonie à s’auto administrer.
Pourtant l’ONU n’a pas l’air de l’entendre de cette oreille et continue sur sa lancée.
Le dernier rapport établi par l’ONU (5) en date du 11 décembre 2023 est assez ambiguë puisqu’il ne prend pas vraiment en compte le résultat du référendum sur l’autodétermination. s’inscrivant contre la pleine souveraineté et l’indépendance. Plus de 60% d’abstentions suite au boycotte de ceux là même qui réclament l’indépendance. Taux dont nous avons l’habitude en métropole.
L’ONU surenchérit dans son rapport puisqu’il « Considère qu’il importe que des mesures appropriées soient prises pendant les futures consultations entre toutes les parties concernées sur le territoire, afin que celui-ci puisse atteindre la pleine autonomie » et que « le Comité spécial doit veiller à ce que les organes compétents de l’Organisation des Nations Unies mènent une campagne de sensibilisation active visant à aider le peuple du territoire à mieux comprendre les options qui s’offrent à lui en matière d’autodétermination »
Aussi bizarre que cela puisse paraître, l’ONU ne permet pas vraiment un dialogue apaisé et ne prend pas en compte les résultats d’un référendum.
Pour essayer de comprendre le cheminement de réflexion de l’ONU, je vais me faire un peu complotiste, c’est à la mode.
La Nouvelle Calédonie ; point stratégique en cas de conflit
Si l’on regarde d’un peu plus près une carte géographique, on peut voir qu’elle se situe dans un triangle entre les Etats-Unis et la Chine. Point stratégique en cas de conflit. N’oublions pas que pendant la seconde guerre mondiale, l’île devient la principale base américaine extérieure dans le Pacifique et compte jusqu’à 50 000 hommes sur son sol. (6)
Vient 1986. A 1 h 23 du matin, la centrale nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine, explose. L’inquiétude domine à l’échelle mondiale en l’absence d’information officielle sur ce qui s’est réellement passé. Ce n’est que dans la soirée que l’URSS confirme l’accident.
En géopolitique les coïncidences n’existent pas. Or, c’est en 1986 que l’ONU remet sur le tapis la décolonisation de la Nouvelle-Calédonie
Qui se rappelle des accords de Matignon en 1988 ainsi que du référendum en métropole ? Ces accords ont été approuvés par les Français le 6 novembre 1988. La question posée était : « Approuvez-vous le projet de loi soumis au peuple français par le Président de la République et portant dispositions statutaires et préparatoires à l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1998 ? ». La mesure fut approuvée à 80 % des suffrages exprimés. La participation fut faible (37 %). Les blancs et nuls représentèrent 12 % des votes.
Un second accord (accord de Nouméa) signé le 5 mai 1998 sous l’égide de Lionel Jospin repousse l’autodétermination jusqu’à une période située entre 2014 et 2018, et prévoit un transfert progressif jusqu’en 2014 de compétences dans tous les domaines sauf la défense, la sécurité intérieure, la justice et la monnaie qui resteraient des compétences de la République française (en matière de politique étrangère, il est prévu d’associer la Nouvelle-Calédonie aux actions de coopérations régionales). Lors de la consultation des populations de la Nouvelle-Calédonie, le dimanche 8 novembre 1998, l’accord de Nouméa a été approuvé à 72 % des suffrages exprimés (taux de participation : 74 % ; blancs et nuls < à 3 %)
Oui, en 1988 on avait encore des référendums pour demander l’avis des Français
En 2007 La loi constitutionnelle n° 2007-237 du 23 février 2007 définit le corps électoral habilité à élire les membres du Congrès et des Assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie. (7) En même temps que la réintégration de la France dans l’OTAN (8)
N’oublions pas les exploitations minières que certains états reluquent : l’ONU « Prie instamment la Puissance administrante de maintenir des mesures propres à protéger et à garantir le droit inaliénable des Néo-Calédoniens sur leurs ressources naturelles et celui de rester maîtres de la valeur future de ces ressources, et demande à la Puissance administrante de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les droits de propriété des Néo-Calédoniens »
Nous allons d’ailleurs avoir le même problème avec la Polynésie remise à l’ordre du jour en 2013, alors que la Grande- Bretagne n’a pas de soucis avec les iles Falkland car elle ne se soumet pas à la Commission de l’ONU qui écrit d’ailleurs « Consciente du non-respect de l’obligation, prévue à l’alinéa e de l’Article 73 de la Charte, de communiquer des renseignements au sujet de certains territoires non autonomes, » (9)
En conclusion
Au lieu de proposer une association libre avec la France comme l’ont fait les USA avec certains territoires stratégiques (10) qui étaient sous leur tutelle, reconnaissait ainsi le lien étroit entre la Nouvelle-Calédonie et nous, nous aurions garder des domaines de compétences en défense. Tout en leur accordant une autonomie complète, nous nous faisons le garant de la défense de ces pays, et donnant aux forces militaires françaises un accès exclusif à leurs territoires, . Vouloir réformer le corps électoral à la façon Emmanuel Macron a été une erreur monumentale qui ne satisfaisait ni les uns, ni les autres et qui risque de nous coûter très cher.
Références
1 Histoire de la Nouvelle-Calédonie – https://www.elections-nc.fr/histoire/l-histoire-de-la-nouvelle-caledonie#:~:text=Le%2024%20septembre%201853%2C%20sur,de%20colonie%20jusqu%27en%201946.
2 https://www.un.org/fr/global-issues/decolonization
3 inscription sur la liste des territoires non autonomes : https://www.un.org/dppa/decolonization/fr/nsgt/new-caledonia#:~:text=La%20Nouvelle-Calédonie%20a%20été,Nouvelle-Calédonie%20et%20ses%20dépendances.
4 https://www.un.org/dppa/decolonization/fr/nsgt
5 Nations Unies – 11 décembre 2023 Soixante-dix-huitième session – Résolution adoptée par l’Assemblée générale le 7 décembre 2023 [sur la base du rapport de la Commission des questions politiques spéciales et de la décolonisation (Quatrième Commission) (A/78/429, par. 33)]Point 58 de l’ordre du jour (A/RES/78/94 ) – Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux https://www.unoosa.org/res/oosadoc/data/resolutions/2023/general_assembly_78th_session/ares7872_html/N2339758.pdf
6 La Nouvelle Calédonie dans les deux guerres mondiales : https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/la-nouvelle-caledonie-dans-les-deux-guerres-mondiales#:~:text=De%201942%20à%201945%2C%20la,menée%20par%20les%20forces%20américaines
7 La définition du corps électoral ; https://www.vie-publique.fr/eclairage/268328-les-lois-constitutionnelles-sur-la-nouvelle-caledonie
8 Réintégartion de la France dans l’OTAN ; https://fr.wikipedia.org/wiki/Réintégration_de_la_France_dans_le_commandement_intégré_de_l%27OTAN
9 ONU – Rapport du Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux sur ses travaux de 2018 – page 42 – https://documents.un.org/doc/undoc/gen/n18/216/95/pdf/
10 Traité de libre association : https://fr.wikipedia.org/wiki/Traité_de_libre-association
Photo de Photo de Ketan Kumawat:: https://www.pexels.com/fr-fr/photo/photographie-de-profondeur-de-champ-de-goeland-blanc-au-sommet-d-un-poteau-en-bois-brun-devant-plan-d-eau-724953/